Étonnant univers que celui de l’internet. Alors que la bulle spéculative que tout le monde connaît a éclaté depuis plusieurs années, et que l’engouement financier pour les nouvelles technologies peine à se remettre de ce jeu de montagnes russes, la nouvelle économie serait-elle en train de découvrir et de mettre à profit ce que l’ancienne (si tant est que cette distinction ait encore un sens) peine encore à admettre ?
Les marques sont en effet l’une des valeurs fondamentales d’une entreprise, bien plus que son cash-flow ou ses indicatifs de croissance. Les grands groupes industriels en font bien trop souvent l’amère découverte lorsque, de restructuration en restructuration, de lancements hasardeux en communication de crise, elles se rendent compte avoir négligé cette part symbolique et pourtant cruciale de leur capital. Sur le web, la plupart des entreprises s’identifient à leur marque, pour le meilleur comme pour le pire. Que celle-ci soit l’objet de doutes, et l’entreprise en fait les frais démesurés.
C’est ce qui est aujourd’hui en train d’arriver à Yahoo. Alors que les bénéfices trimestriels d’exploitation ont progressé de 75% par rapport à l’année dernière, ceux-ci restent en-deça de ce que les analystes financiers avaient prévu. Voilà pour la part objective. Mais Yahoo n’est Yahoo que par rapport à Google, dont la prééminence médiatique et charismatique n’est plus à prouver, et l’action Yahoo a chuté de plus de 11% en une journée à la bourse de New-York.
Il a souvent été dit que sur le web, être le premier sur un marché offrait un avantage concurrentiel quasi-insurmontable, pour peu que l’on se donne la peine de continuer à innover sur son marché. Google existe officiellement depuis 1998, Yahoo depuis 1996. Mais Google a réussi ce que Yahoo n’a jamais su concrétiser: il est devenu une marque, un emblème de référence, et même si ses propres résultats financiers, annoncés demain à Wall Street, sont en-deça des espérances des analystes fianciers, je doute que la conséquence en soit aussi drastique. Là où Yahoo est un portail, un outil du net, Google est un symbole, le véhicule de tout un imaginaire. Et cette simple distinction crée un abîme infranchissable..