Hier soir, lors d’une table ronde organisée sur le thème de communication on / communication off, à l’occasion des 50 ans d’Information Presse et Communication, le thème des blogs a juste été effleuré par les journalistes invités. Il est vrai qu’à cet égard, les véritables enjeux qui se posent aux médias sur internet, qu’ils s’agissent de ceux liés à la forme et à la structure de l’information, ou de ceux liés à son contenu même, commencent à peine à émerger.
Vidéo on demand, podcasts, flux RSS, les nouveaux outils du web 2.0 ouvrent de nouveaux possibles, accélèrent le traitement et l’échange de l’information. Au premier, l’interactivité des blogs permet aux journalistes de renouer avec leurs lecteurs un dialogue longtemps interrompu, de pratiquer une sorte de «courrier des lecteurs» en ligne. C’était l’avis d’Antoine Thibouméry, membre du comité éditorial des Echos, et c’est la forme pratiquée par de nombreux supports de la presse professionnelle (voir par exemple le blog de 01 Informatique, ou celui de l’Argus de l’Assurance). Mais quel intérêt y a-t-il d’utiliser un blog pour se contenter généralement de mettre en ligne un édito ou un sommaire, et d’attendre statiquement la réaction des lecteurs ? Les initiatives de la presse sont encore bien balbutiantes…
Mais si la majorité des supports cherchent encore leur voie sur internet, certains s’y sont déjà plongés, mais les interrogations que cela soulève sont plus profondes encore. Média réactif, instinctif, le blog est non seulement le moyen idéal de collecter et de diffuser l’information « à chaud », mais suppose une écriture différente, une vision plus holistique des articles et des billets publiés. Un intéressant article d’Adrian Holovaty, du Washington Post, argumente l’inadaptation de l’écriture journalistique traditionnelle à l’interactivité du web. Information structurée par excellence, un article de presse perd une partie de sa pertinence sur internet, s’il ne permet pas en même temps de renseigner le contexte de l’information qu’il transmet, ne s’adapte pas à une nouvelle lecture, moins linéaire, plus multidimensionnelle.
Le contenu même de l’information n’échappera pas à une remise en question radicale. Si, comme l’attestaient les journalistes présents hier soir, ils utilisent les blogs pour pister l’information, la majorité d’entre eux n’accordent guère de crédit à ce qu’ils y trouvent. La légitimité de la blogosphère reste à construire.
Un article du Monde, daté du 7 octobre dernier, parle, de son côté, des blogs tenus par des journalistes, qui y exposent souvent les coulisses de l’information donnée sur le devant de la scène. Ainsi, celui de Jean-Michel Aphatie, chroniqueur politique sur RTL, est une tribune permettant à son auteur de prolonger ses interviews en en racontant les à-côtés. Mais, alors que le jeu du on/off des hommes politiques et des dirigeants d’entreprise semble être suffisamment codifié pour que la ligne entre les deux ne soit pas franchie innocemment à l’antenne ou dans la presse, les journalistes eux-mêmes ne risquent-ils pas de brouiller à nouveau les cartes? La liberté de parole saura-t-elle s’accommoder des nouveaux outils mis à sa disposition?